Éléments d’équipement à vocation exclusivement professionnelle : contours de la garantie décennale

La question de la garantie décennale des éléments d’équipement intégrés à un ouvrage fait l’objet d’une jurisprudence constante, mais parfois nuancée, de la Cour de cassation.

L’arrêt du 6 mars 2025 (Cass. 3e civ., 6-3-2025, n° 23-20.018 FS-B, Axa France IARD c/ Sté de lavage automobile) vient rappeler avec force les limites de cette garantie pour les équipements à vocation exclusivement professionnelle.

Un cas concret : le séparateur d’hydrocarbures

Dans cette affaire, un séparateur d’hydrocarbures installé dans une station de lavage avait généré des débordements d’eaux non filtrées, conduisant à une action en indemnisation contre l’entreprise et son assureur.

Si la cour d’appel avait admis la responsabilité décennale, la Haute juridiction casse l’arrêt, estimant que le séparateur, dont la fonction exclusive est de permettre l’activité de la station, relève de l’article 1792-7 du Code civil et échappe donc à la garantie décennale.

L’article 1792-7 du Code civil et son champ d’application

L’article 1792-7 du Code civil, issu de l’ordonnance du 8 juin 2005, précise que les éléments d’équipement dont la fonction exclusive est de permettre l’exercice d’une activité professionnelle ne sont pas couverts par la garantie décennale.

Cette exclusion, justifiée par la nature même de ces équipements, impose une analyse rigoureuse de la destination de l’élément concerné.

Une distinction parfois délicate

La distinction entre fonction professionnelle et fonction immobilière demeure délicate.

La jurisprudence administrative (CE 5-6-2023, n° 461341, Sté Rousseau) a ainsi pu admettre la garantie décennale pour une climatisation défectueuse affectant la destination de l’ouvrage.

En pratique, il convient donc d’apprécier au cas par cas la vocation de l’équipement, tout en anticipant le risque d’exclusion d’assurance pour les équipements à usage strictement professionnel.

Quelles précautions pour les entreprises ?

Les entreprises ont tout intérêt à souscrire une assurance complémentaire pour couvrir leur responsabilité en dehors du champ de la garantie décennale.

Cet arrêt invite à une vigilance accrue lors de la rédaction des contrats de construction et d’assurance. Il incite également à une analyse stratégique des recours à mobiliser en cas de sinistre, la responsabilité de droit commun devant être invoquée à titre subsidiaire lorsque la garantie décennale est écartée.