Extension des procédures collectives au dirigeant

La Cour de cassation, dans un arrêt du 26 mars 2025 (Cass. com. 26-3-2025 n° 24-10.254 F-D), a rappelé avec force que la procédure collective d’une société peut être étendue à son dirigeant, même en l’absence de toute faute de ce dernier, dès lors qu’une confusion de patrimoines est caractérisée par des relations financières anormales.

Cette décision, transposable à l’extension des procédures de sauvegarde ou de redressement judiciaire (C. com. art. L 621-2, al. 2, L 631-7 et L 641-1), marque une inflexion notable dans l’appréciation des conditions d’extension des procédures collectives.

Confusion des patrimoines : un critère déterminant

La Haute juridiction censure l’analyse de la cour d’appel, qui avait refusé l’extension au motif que le dirigeant, en renonçant à réclamer les loyers dus par la société pour préserver sa survie, n’avait commis aucune faute.

Or, selon la Cour de cassation, seule la confusion des patrimoines, matérialisée par des flux financiers incompatibles avec des relations contractuelles normales, suffit à justifier l’extension, indépendamment de l’intention ou de la faute du dirigeant.

Un ancrage dans la jurisprudence

Cette position s’inscrit dans la lignée d’une jurisprudence constante qui retient, par exemple, l’abandon de loyers comme indice de confusion de patrimoines (Cass. com. 15-2-2005 n° 03-13.224 F-D ; Cass. com. 1-10-2013 n° 12-24.817 F-D ; Cass. com. 20-10-2021 n° 20-17.124 F-D), tout en rappelant que la fraude n’est pas, à elle seule, un critère suffisant (Cass. com. 10-1-2006 n° 04-18.917 FS-D).

Conséquences pratiques pour les dirigeants

Cette évolution impose une vigilance accrue aux dirigeants et associés dans la gestion des flux financiers entre leur patrimoine personnel et celui de la société. L’absence de formalisation ou la tolérance de pratiques dérogatoires aux règles contractuelles classiques peuvent désormais suffire à engager leur responsabilité patrimoniale, sans qu’il soit nécessaire de démontrer une intention frauduleuse ou une faute caractérisée.

L’analyse stratégique des dossiers de contentieux en droit des affaires doit ainsi intégrer cette nouvelle donne, afin d’anticiper les risques d’extension des procédures collectives et de sécuriser les relations intra-groupes ou entre associés et société.